Réformer la structure de l'enseignement secondaire : l'exemple de la Pologne

L'expérience polonaise est encore plus spectaculaire que celle de l'Allemagne.

Il se pourrait que la démarche polonaise constitue un cas d'école.

Tout en présentant des similitudes nombreuses avec ses voisins européens en matière d'Education, la Pologne est le seul pays européen à avoir réformé aussi profondément la structure de son système éducatif obligatoire sur la période récente.
De nouvelles politiques éducatives furent élaborées en 1999 et mises en œuvre au début de la décennie 2000.

L'un des volets principaux de la réforme fut notamment de prolonger d'un an la scolarité au sein du tronc commun et de repousser ainsi à l'âge de 16 ans le palier d'orientation.

La Pologne est ainsi passée d'une structure éducative avec un premier palier d'orientation à 15 ans - comme ce que connaissent la Belgique, la France, l'Irlande, l'Italie, le Portugal, la Bulgarie et la Roumanie - à une école unique jusqu'à 16 ans comme les pays scandinaves - Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède) et le Royaume Uni.

En fait , ce sont les exigences de l'Union Européennes qui ont amené la Pologne à rénover de manière substantielles ses grands services publics et notamment son système éducatif.

La réforme poursuit trois objectifs principaux.

1- Augmenter le niveau d'éducation de la population
2- Accroitre l'offre de formation scolaire
3- Améliorer la qualité de l'éducation

Dans cette optique, la structure ancienne du système éducatif, comprenant 8 années d'éducation primaire suivie par - au choix - 2, 3 ou 4 années dans diverses filières est remplacée par la structure 6+3+3.

L'école primaire débute toujours à l'âge de 7 ans mais se termine dorénavant à l'âge de 13 ans : sa durée est réduite à 6 années.
Puis les élèves poursuivent leur scolarité pendant 3 années au Gymnasium, établissement de l'enseignement secondaire inférieur.
A 16 ans, à la fin du Gymnasium, ils choisissent une orientation parmi 4 formations du secondaire supérieur (générale, technique, professionnelle supérieure ou basique).

La ré&forme a donc déplacé d'un an le choix d'orientation vers les voies générales ou professionnelles : le tronc commun est passé d'une durée de 8 années à 9 ans.

Les réformateurs souhaitent ainsi que l'introduction du Gymnasium permette l'élévation du niveau d'instruction en Pologne , en particulier dans les zones rurales.

Les nouveaux Gymnasiums doivent accueillir plus d'élèves que les anciennes écoles primaires, disposer de davantage de ressources et employer des enseignants plus qualifiés.

!Des modifications ont également vu le jour en matière de méthodes d'enseignement .

Alors que l'ancien système éducatif centrait ses objectifs sur la mémorisation de l'information, la réforme prévoit que les établissements puissent élaborer leurs propres programmes en se référant à un cadre général préétabli lequel met l'accent sur trois dimensions : l'acquisition du sacvoir, le développement de compétences et la formation des attitudes telles que la motivation.

Dès lors, les professeurs ont été invités à s'adapter aux besoins de leurs élèves et à adopter leur propre style d'enseignement.

En complément de la décentralisation et de la restructuration du système éducatif, des tests d'évaluation standardisés des compétences des élèves sont organisés à la fin de l'école primaire et du Gymnasium.

Comme l'essentiel de la réforme polonaise s'est mise en place entre les deux premières vagues d'enquête PISA (PIS 2000 et PISA 2003), il donc possible de comparer, avant et après la réforme, le niveau des élèves et les inégalités de réussite entre les élèves.

De plus, l'expérience polonaise permet notamment d'examiner les effets de l'allongement du troc commun sur l'efficacité (le niveau moyen) et l'équité (les écarts de compétences entre élèves) du système éducatif.

Les analyses de la réforme débouchent sur un constat : les scores de réussite aux tests OPISA des élèves polonais ont substantiellement progressé.!!Alors qu'en 2000, les résultats de la Pologne en compréhension de l'écrit étaient significativement inférieurs à la moyenne des pays membres de l'OCDE, en 2003, ils deviennent comparables, puis en 2006 et 2009 significativement supérieurs au score moyen de l'OCDE.

D'après les experts du Centre de Recherche Sociale et Economique de Varsovie, la progression nationale serait essentiellement due au fait que le niveau de compétence du quart des élèves les plus faibles, ce qu'ils perçoivent comme une conséquence de la réforme.
Il est aussi souligné que la motivation des élèves, la modification de leur attitude est réelle. En 2000, les élèves de l'enseignement professionnel n'ont pas attaché beaucoup d'intérêt aux test PISA alors qu'en 2003 mélangés au sein du Gymnasium avec des élèves motivés leur attitude fut toute différente. De plus, l'introduction en 2002 d'examens standardisés à la fin du primaire et du Gymnasium aurait entraîné les élèves à passer des test et cela aurait été profitable pour les vagues pISA 203 et suivantes.

Les experts se sont également interrogés quant à la place à donner à l'enseignement professionnel au sein du système éducatif.

Ils ont testé l'hypothèse selon laquelle le report d'un an de l'orientation vers la filière professionnelle serait aussi à l'origine de l'amélioration des compétences des élèves .
Grâce à des méthodes statistiques sophistiquées, ils ont estimé le gain de réussite dont ont bénéficié les élèves qui, dans l'ancien système, auraient été scolarisés au sein des établissements professionnels, et qui, en vertu de fla réforme, sont maintenus une année supplémentaire au sein du tronc commun d'enseignement général. Selon leurs estimations, la réforme structurelle a permis aux élèves qui auraient potentiellement fréquenté la filière professionnelle basique en 2003 si la refonte n'avait pas eu lieu de progresser de 100 points de score au test de compréhension de l'écrit de PISA (le score moyen des élèves de l'OCDE étant de 500 points et l'écart-type de 100 points).
Le niveau moyen des élèves est passé de 480 à 520 de 2000 à 2012.

Commentaires

1. Le 12/05/2017, 17h04 par Marceline

N'y a-t-il pas un contraste saisissant entre les exemples allemand et polonais et le cas français ?
Eux ont véritablement conçu des réformes à partir des enseignements tirés des diagnostics posés sur leur système éducatif.
Suite au choc PISA 2000, l'Allemagne a mis en place une série de réformes. L'une d'elles a consisté à réduire les effectifs des filières professionnelles courtes au profit des filières générales longues.
La Pologne a modelé son école obligatoire à la manière des systèmes scolaires scandinave et anglo saxon et prolongé d'une année son troc commun général.
Dans le même temps, ces deux pays ont connu une augmentation des compétences de leurs élèves et en particulier celles des plus faibles.
A l'inverse, sur la même période, l'école française se caractérise par une hausse des inégalités de réussite doublée d'une baisse légère du niveau général des élèves.
En France, les élites politiques ne semblent pas prendre en compte les diagnostics formulés sur les sytème éducatif et pas davantage disposés à lancer des réformes mises en œuvre ailleurs avec succès.
Les comparaisons internationales des systèmes éducatifs et les analyses spécifiques de réformes éducatives comme celles mises en œuvre en Allemagne en Pologne s'avèrent pourtant fort instructives (sic).
Elles indiquent que les pays dotés d'une école unifiée et inclusive, caractérisée par des différences qualitatives faibles entre les filières et une différenciation limitée du réseau d'établissements tendent à donner des systèmes éducatifs plus performants, moins inégalitaires que les autres.
Les résultats de ces réformes ne devraient-elles pas être prises en compte pour revoir celle de notre collège (re sic)?

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