« ANTISOCIAL » Le trait caractéristique de la politique présidentielle, du gouvernement en fait du « MACRONISME » !!! (5)

Anti-chômeurs … (1)

Quoi de plus banal que la scène suivante ?

Vous êtes à « Pôle Emploi » dans la file d’attente et vous entendez distinctement ce qui est dit à votre prédécesseur :

« Ecoutez-moi monsieur. Les formations coûtent cher, nous avons des listes de priorité pour les inscriptions. Vous n’en faites pas partie. Il faut le comprendre. »

Après un silence…
« Vous avez 59 ans, tout de même. »

C’est là l’histoire d’un droit magnifique proclamé pour tous à la face du monde entier : le droit à un travail.

Droit dénaturé, défiguré, jusqu’à devenir un système monstrueux d’oppression et de culpabilisation des chômeurs ?
En témoignent notamment – mais pas seulement – deux films : « La Loi du Marché » sorti en 2015 réalisé par Stéphane Brizé et « Moi Daniel Blake » de Ken Loach en 2016.

La Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 proclame sans la moindre équivoque qu’avoir un travail est un droit et que la puissance publique a le devoir d’en donner un à chacun. « Toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage » est-il écrit à l’article 23 alinéa 1.

En bonne logique, on devrait en déduire que l’Etat a l’obligation de créer des activités, et donc des emplois pour toutes les personnes auxquelles l’économie de marché échoue à proposer du travail.
Rappelons ici que bien avant la Déclaration universelle, c’est selon ce raisonnement qu’avaient été créés, en 1848, les « Ateliers nationaux ». Sous la IIème république, c’est sous l’influence du socialiste Louis Blanc que sont créées et financées des coopératives d’ouvriers pour faire baisser le chômage. L’initiative sera interrompue quand les élections législatives donnent une assemblée conservatrice qui craint que la garantie d’avoir un emploi grâce aux « Ateliers nationaux » fasse monter les salaires de tous les ouvriers (tiens donc). Elle vote donc leur dissolution. Il s’en suit des révoltes ouvrières réprimées par l’armée sous le commandement du général Cavaignac : 4 000 à 6 000 morts parmi les insurgés avec en plus 1 500 fusillés sans jugement. 15 000 sont condamnés à la prison ou à la déportation en Algérie française.
Tout laisse à penser que « l’armée industrielle de réserve » que constitue la population au chômage pèse sur le niveau des salaires : ne vous plaignez pas trop du bas niveau de votre salaire sinon vous rejoignez les « sans salaire ». Et plus cette population est nombreuse plus elle exerce sur les salaires une pression à la baisse. Et, plus la masse salariale baisse, plus - à niveau de production égal - les profits augmentent. (eh ! bien voilà une solution qu’elle est bonne !)

L’oligarchie, dominant notre système économique, a en effet intérêt à l’existence durable d’un chômage de masse et pas du plein emploi : comme le présentait déjà Karl Marx dans « Le Capital » .

Si l’Etat finançait sur fonds publics un emploi pour toutes celles et tous ceux qui n’en n’ont pas, il condamnerait l’oligarchie à devoir payer de meilleurs salaires afin que tout un chacun soit attiré par les emplois qu’ils proposent.

Oui, les dominants de notre système économique ont intérêt à ce que l’Etat ne remplisse pas son devoir de créer lui-même des emplois pour les personnes que l’économie de marché laisse au chômage.
En fait, depuis la fin des « Trente glorieuses » (fin des années 70) – et peut-être même avant (dès 1948) - les pouvoirs publics français ont doublement perverti et dénaturé le sens de ce « droit au travail » pourtant parfaitement clair dans la « Déclaration universelle des droits de l’homme » de 1948 !
Et cela dans deux sens :
- D’une part, ils en ont fait un droit à l’indemnisation si l’on est au chômage, ce qui n’est pas du tout la même chose. Le devoir qu’a l’Etat de donner du travail à chacun(e) est politiquement exigeant envers les gouvernants et – n’ayons pas peur de l’affirmer – cela implique mécaniquement de ressusciter les « Ateliers nationaux » sous une forme ou une autre grâce à la modernité. Ils en ont fait une simple obligation de distribuer de l’argent public aux chômeurs afin que ceux-ci puissent survivre.
- D’autre part et de plus, le devoir qu’a l’Etat de créer du travail pour tous a été - petit à petit - dénaturé pour devenir un devoir qu’a le chômeur de chercher du travail sous la surveillance de l’Etat : ce n’est pas du tout la même chose .
- De plus, la culpabilité de l’Etat qui échoue à garantir un emploi pour chacun(e) alors que c’est un droit, est transformée en présomption de culpabilité du chômeur d’être au chômage. C’est un comble !

Ainsi, aboutit-on à la politique actuelle des pouvoirs publics face au chômage : l’indemnisation financière des chômeurs, assortie d’un contrôle administratif de plus en plus proche du harcèlement moral pour faire peser sur elles et eux la culpabilité de la situation.
Cette politique s’appuie sur des préjugés anti-chômeurs que la propagande du système en place entretient sans compter. Il développe insidieusement des croyances :

_ «  Les chômeurs pourraient trouver du travail s’ils le voulaient vraiment ….Il suffirait de traverser la rue ! »
_ Cela revient à considérer que l’essentiel des chômeurs le sont volontairement et sont donc coupables de leur sort.

En 2014, un sondage de l’IFOP sur le thème « Les Français, la politique sociale et la lutte contre l’assistanat » révélait que 58% des Français étaient d’accord avec cette accusation de parasitisme alors qu’elle est totalement fausse….
Si c’était vrai que les chômeurs préfèrent dans leur large majorité rester chômeurs, il ne devrait pas y avoir une baisse significative du chômage lorsque le retour de la croissance économique fournit davantage de postes à pourvoir !
Effectivement on observe le contraire de ce qui est supputé !
Plus les offres sont abondantes plus le chômage baisse.
Inversement lorsque l’économie est en stagnation – voire en récession - les postes à pourvoir deviennent rares et le taux de chômage s’envole.

Prenons deux exemples :

La croissance économique très soutenue des « Trente glorieuses » a correspondu à un chômage quasi nul, tandis que, dans les années suivant le Krach financier de 2007-2008, la stagnation de l’économie française a correspondu à un taux de chômage élevé et en hausse permanente.

Ce constat de la hausse ou de la baisse du chômage selon qu’il y a hausse ou baisse des offres d’emplois suffit à invalider la thèse des chômeurs qui pour l’essentiel n’auraient pas de travail « parce qu’ils ne cherchent pas vraiment ».
En 2017, « Pôle emploi » a dévoilé des chiffres qui prouvent à quel point les préjugés anti-chômeurs sont des mensonges et partant des insultes. Sur un vaste échantillon de 270 000 chômeurs contrôlés de manière approfondie par l’organisme, un total écrasant de 86% remplissaient indiscutablement leurs obligations de recherche d’emploi. Par ailleurs, sur les 14% restant, 60% n’étaient pas indemnisés par l’assurance chômage et ne lui coûtaient donc rien.
Alors que le procès fait aux chômeurs « qui touchent les allocations mais ne cherchent pas vraiment du travail » revient sans cesse, en réalité cette accusation est mensongère pour plus de 94% des chômeurs.
Il est un autre constat très simple pour invalider cette accusation de parasitisme. De nos jours, en moyenne, des offres d’emploi croulent sous les candidatures. C’est ainsi que dans le secteur de la communication avec 83 candidatures pour une offre, le recrutement est environ quatre fois plus sélectif qu’au concours d’entrée de l’ENA où en 2017 se présentaient 23 candidatures pour une place.
Toujours est-il que cette surabondance de candidats aux offres d’emplois tend, elle aussi, à prouver le caractère ignoble de la thèse « Chômeurs volontaires ».

De plus, il est un autre cliché auquel il faut tordre le cou !

Il y aurait en France 300 000 emplois non pourvus faute de candidats, ce qui sous-entend – bien sûr- que les chômeurs seraient coupables de leur sort faute d’aller chercher un poste là où pourtant il les attend : en traversant la rue par exemple !
L’émission « Le Vrai du faux » sur France Info relevait, en 2015, que les responsables politiques évoquent régulièrement cet eldorado d’emplois laissés en jachère. Après recherches, il a été prouvé que ce mythe correspond en réalité au nombre total de recrutements abandonnés par les entreprises sur une année selon Pôle emploi et le MEDEF. De plus, selon l’observatoire patronal « Tendance Emploi Compétence » (T.E.C) près de la moitié des recruteurs ayant renoncé à embaucher l’ont fait en raison de la situation économique et non pas faute de candidats. (sic)
Pur mensonge que de ne faire qu’accuser – une fois de plus - les chômeurs et tout cela - ne l’oublions pas – pour détourner l’attention de cette obligation qui est celle de l’Etat : donner un emploi à chacun(e).
Certes, il y a des métiers précis, identifiés de longue date par la statistique de l’emploi – mais que fait-on contre ? – qui peinent à trouver des candidat(e)s ayant les qualifications requises. Il s’agit notamment des ouvriers qualifiés, des dessinateurs pour le secteur industriel, des ouvriers de maintenance, des métiers de la santé comme de l’informatique.
C’est un fait. Sans exclure qu’il faudrait, pour ces types de métiers là, mettre en place des actions spécifiques…précisons que, chaque année, Pôle emploi évalue les postes non pourvus à 120 000 soit largement moins que le mythe colporté des 300 000 !
Soulignons aussi que ces 120 000 ne correspondaient qu’à 2% des 5,6 millions de personnes au chômage en mars 2018. En fait, si les postes vacants étaient pourvus 98% des chômeurs resteraient au chômage ! (re sic).
Il est une autre accusation qui est faite aux chômeurs pour les rendre coupables de leur situation : c’est en raison de leur formation inadaptée aux attentes des recruteurs.
La D.A.R.E.S (Direction de l’Animation de la Recherche des Etudes Statistiques du Ministère du travail) a évalué que la spécialité de formation du (de la) candidat(e) est secondaire pour obtenir un recrutement : le niveau de diplôme – quelle que soit la spécialité – est un critère bien plus prioritaire pour l’embaucheur. Quant aux travaux de recherche du C.E.R.E.Q (Centre d’Etudes et de Recherches sur les Qualifications), ils ont établi qu’en France seul un tiers des personnes qui ont un travail avaient été formées pour l’emploi qu’elles occupent.

L’accusation – encore là – est donc fausse !

Voici donc pour cette première approche du dénigrement de cette population citoyenne dont – on l’aura compris – on se sert pour camoufler l’irresponsabilité des dirigeants depuis des décennies au regard du respect de la Déclaration des droits de l’homme.

Il nous faudra ultérieurement aborder :

- la question de l’assurance chômage.
- celle qui consiste à laisser planer le doute quant au fait qu’on pourrait vivre mieux en restant au chômage qu’en travaillant.
- la comparaison entre l’aide sociale et les ressources du travail.
- la façon dont nos chômeurs sont traités.

Ajouter un commentaire

Le code HTML est affiché comme du texte et les adresses web sont automatiquement transformées.

Fil des commentaires de ce billet