Blog de Jean-Pierre LEROY

Les locaux scolaires doivent permettre des modalités de regroupement différenciées des élèves.
Dès l'école primaire, certains enseignements - des exposés, des spectacles, des projections - peuvent être effectués dans des amphithéâtres regroupant l'équivalent de plusieurs classes. Par contre, il faut accéder à des petites salles pour un travail en groupe d'appropriation.
Dans tous les cas, on doit entrainer les élèves au respect des rituels spécifiques dans des lieux spécifiques (laboratoire, salle de théâtre, salle de tatami, bibliothèque , salle de réunion...) qui appellent des comportements particuliers.
En fait, en entrant dans différents lieux à chaque fois l'élève doit savoir ce qu'on attend de lui.
Il faut en finir avec les salle de classe anonymes.
Que l'on regroupe des élèves en unités de 20 à 30 - qu'on nomme classe depuis la fin du 19ème siècle- pourquoi pas comme pôle d'appartenance et de référence (pour ne pas trop perturber les esprits) MAIS IL FAUT COMPLETER par des espaces-temps dévolus à d'autres modes de fonctionnement : utilisation des nouvelles technologies, démarche expérimentale et documentaire, création artistique, éducation physique, suivi individualisé des élèves...
En fait tous les groupements d'élèves doivent être construits sur le principe de "groupes de projets"mobilisateurs, capables de donner les moyens aux élèves de s'impliquer dans un groupe structuré où chacun a une place sans y être enfermé.
Les conséquence architecturales pour construire du neuf sont nombreuses comme les impératifs d'aménagement et de restructuration des locaux existant. On ne fera croire à personne que la profession ne soit pas à même de faire du neuf avec de l'ancienne architecture.
Les bureaux de l'administration comme ceux des enseignants, les locaux dévolus aux disciplines spécialisées, les salles d'étude et les ateliers... doivent être dispersés afin de favoriser une vie sociale en évitant la surchauffe à un endroit et la léthargie ailleurs. Les adultes doivent habiter l'école, toute l'école et cesser d'encloisonner les bâtiments scolaires tout en se réfugiant dans des espaces protégés laissant le reste des locaux sous l'œil des surveillants qui n'ont pas de légitimité disciplinaire puisqu'ils n'enseignent pas.
"Qu'elle révolution !" ... J'entends déjà hurler du fond de nos écoles .... Enfin ! Une autre utilisation des locaux adaptée à des fins pédagogiques favorables à NOS ENFANTS !
Quel crime !
Il faut aussi créer - aux quatre coins de l'établissement - des espaces de vie sociale mis à disposition avec des règles de fonctionnement établis, discutés, revus régulièrement dans les différentes instances statutaires de l'établissement.
De plus, l'Ecole, dans sa conception même, doit être, à la fois, un lieu de travail calme et exigeant, libéré des pressions extérieures et un lieu d'accueil ouvert à l'environnement : les interfaces - en particulier avec les familles mais pas seulement - doivent trouver leur lieu dans l'architecture interne de l'établissement.
Utopique !!!???
Inversons les propositions ?
Rien n'est plus utopiste que d'imaginer enseigner à des élèves qui déambules dans des espaces inconfortables et indifférenciés où aucun investissement personnel ou collectif n'est possible.
Rien n'est plus utopiste que de vouloir former des jeunes à la concentration, à la ténacité et à la rigueur intellectuelle hors de lieux dédiés et identifiés comme tels.
IL FAUT PROMOUVOIR DES ESPACES DE TRAVAIL QUI PORTENT EN EUX DE VERITABLES EXIGENCES INTELLECTUELLES.....
IL FAUT VERITABLEMENT CONSTRUIRE LA MAISON ECOLE :créer des unités d'élèves à taille humaine où un groupe d'adulte puisse incarner solidairement le projet d'éduquer et le mettre en œuvre dans un cadre structuré.
La pédagogie affirme aussi la nécessité de construire les apprentissages autour d'activités qui "lestent la surcharge affective", permettent d'objectiver les contraintes et à chacun(e) d'avoir une place.
La pédagogie insiste aussi sur l'importance des rituels qui séparent, spécifient et structurent l'ensemble des tâches. Non point des rituels formels qui contrôlent les corps pour normaliser les esprits mais des rituels directement liés aux exigences des apprentissages et qui permettent - comme au judo ou au théâtre - d'articuler son intériorité et son activité.
La pédagogie suggère aussi de remplacer les évaluations-sanctions par la construction de chefs-d'œuvres grâce auxquels on peut se dépasser et accéder à de nouveaux savoirs.
La pédagogie recommande une extrème attention aux conditions de travail et au matériel pédagogique : la disposition des tables, la décoration des murs, la tenue des cahiers, la mise à jour des fichiers, le rangement des bureaux, la manière d'écrire au tableau, la préparation des outils de travail...Tout cela est essentiel à tous les niveaux scolaires et relève d'une exigence intellectuelle particulièrement formatrice.
La pédagogie invite donc, plus globalement, à fabriquer de l'école, concrètement, sans se payer de mots, en travaillant au quotidien à élaborer les médiations les plus pertinentes.
Elle propose de réarchitecturer l'école en associant pour cela tous les acteurs concernés, celles et ceux qui commandent et conçoivent les bâtiments scolaires, celles et ceux qui les dirigent et les entretiennent, celles et ceux qui y exercent leur métier, celles et ceux qui y vienennent apprendre.
La modernité exige des bâtisseurs !