Ni de Gauche ! Ni de Droite !! Ni du Centre !!! (10)

Souvenez-vous, Monsieur le Président, c'était le 18 septembre 2015 vous déclariez, dans une intervention au Think Tank (de gauche) "En temps réel" : "Le statut de fonctionnaire est de moins en moins défendable"

Vous illustriez votre pensée en déclarant notamment "On va progressivement entrer dans une zone - on y est déjà d'ailleurs- où la justification d'avoir un emploi à vie garanti sur des missions qui ne le justifient plus sera de moins en moins défendable" et vous poursuiviez pour illustrer votre préoccupation Je ne sais pas justifier que quelqu'un qui travaille dans la cybersécurité dans une PME soit un contractuel en CDD et que quelqu'un qui travaille, par exemple, dans mon ministère, dans le développement économique doive être fonctionnaire. Il n'y a plus de justification fonctionnelle à cela ".

Cette sortie n'a rien d'une erreur de communication, elle s'inscrit dans une lignée de ce qui se fait depuis trente an : stigmatiser le service public et opposer les fonctionnaires aux salariés du privé.

Qu'il y ait des fonctionnaires d'Etat, avec un étalement de la mission sur la durée d'une carrière professionnelle, quoi de plus logique à moins de supprimer l'Etat et/ou certaine de ses fonctions. Par contre, la mise au travail intelligemment organisée n'est-elle pas de la compétence des dirigeants qu'ils soient dans des fonctions à durée déterminée voire limitée -élu(e)s de tous ordres, ministres et Président de la république...?

Regardons y de plus près, si vous le permettez Monsieur le Président !

POURQUOI LA FONCTION PUBLIQUE ?

Les raisons du statut de fonctionnaire ne tiennent-elles pas très largement à la nature des emplois occupés?
Des fonctions aussi larges que l'éducation, la santé, la justice ou la police doivent s'exercer sur la base du respect des principes démocratiques du service public comme l'impartialité, la neutralité, la probité ou l'égalité de traitement des citoyen(ne)s.
Je crois pouvoir dire que le statut est moins pensé pour avantager le fonctionnaire que pour servir le(la) citoyen(ne).
De plus, en mettant le fonctionnaire à l'abri de l'arbitraire, il est rendu difficile - à un pouvoir politique - d'instrumentaliser l'administration à des fins partisanes.
C'est une garantie d'indépendance.
Ce statut empêche certaines mairie ayant basculé au FN de licencier le personnel de la ville et de réorganiser de fond en comble les services publics municipaux en fonction de leurs objectifs politiques.
Oui, le statut de la fonction publique fait barrage aux manœuvres des politiques.

Il est aussi important de souligner, Monsieur le Président, que les missions de service public portent sur des domaines qu'on ne peut laisser totalement au secteur marchand ! Quand même, Monsieur le Président, vous n'y pensez pas pour l'éducation et la Santé entre autres !!

Ces services financés par l'impôt sont en partie gratuits à la consommation, permettant et garantissant un accès à tous et toutes.

Une privatisation totale augmenterait les inégalités dans l'accès à ces services. Si les médicaments n'étaient plus du tout remboursés par la Sécurité Sociale, une large frange de la population ne pourrait plus se soigner.
Le financement des services publics par l'impôt permet de mieux répartir la charge sur l'ensemble des citoyen(ne)s.

En laissant ces missions publiques au secteur privé, on allègerait certes la pression fiscale, mais on laisserait volontairement une partie de la population au bord de la route !

C'est le cas aux Etats-Unis, où, chaque année, 2 millions d'Américains se déclarent en faillite personnelle à cause de factures médicales.

Le choix du statut de fonctionnaire, à l'origine, avait donc pour but : assurer aux citoyens une mission de service public stable et durable.

De grâce, Monsieur le Président, remettre ces services au secteur privé c'est ne plus contrôler leur tarification, c'est tenir compte (encore plus) d'enjeux de rentabilité dans les choix de ces services et, enfin, c'est en exclure le plus démunis .

Commentaires

1. Le 29/05/2017, 10h27 par Caroline

Pour les libéraux, les fonctionnaires sont volontiers jugés coûteux et inefficaces.
Inefficaces car le statu à vie les rendrait paresseux, et coûteux car leur salaire est de fait au-dessus de leur productivité marginale (comme ils disent) puisque leur statu particulier les met à l'abri de la concurrence.

2. Le 29/05/2017, 10h43 par Jean-Pierre LEROY

Oui, Caroline. Vous avez raison. On peut même souligner que cette vison est désormais largement admise dans l'opinion publique.
Je crois qu'il faut à l'honnêteté de souligner que les politiques (consciemment et/ou inconsciemment) ont contribué à véhiculer cette image peu flatteuse durant les 30 dernières années.
Je ne peux oublier que dès 1984 - je venais être nommé Principal de collège à Tourcoing - dans le monde syndical nous étions atterrés d'entendre Laurent Fabius, homme de gauche, parler de la nécessité de "moderniser le statut" en donnant l'impression de s'attaquer à des prétendus privilèges alors que le sujet était aussi et surtout d'adapter chaque mission aux évolutions sociétales.
Je reste persuadé qu'il était certes urgent de moderniser les équipements des administrations et des infrastructures publiques sans oublier de prendre en compte bien évidemment les modifications statutaires que cette modernisation générale induirait.
Je n'ai vu arriver les prémices de cette modernisation qu'à la veille de la retraite (première moitié des années 1990).
De plus, au cours des années 1990, une modification de la comptabilité de l'Etat a indiqué que le coût d'un fonctionnaire devait non seulement se penser pendant sa durée d'activité, mais aussi en tenant compte de sa retraite à venir.
Dès lors, ce coût est apparu encore plus exorbitant pour la collectivité, ce qui a contribué à considérer le fonctionnaire sous l'angle des dépenses occasionnées plutôt que comme un agent en charge d'offrir une mission de service public.

3. Le 29/05/2017, 11h03 par Philippe

Je me permets aussi d'attirer l'attention sur le rôle de la Commission Européenne dans ce travestissement de la mission du fonctionnaire.
L'Union Européenne a remis au goût du jour la thèse de la fonction publique éclatée en métiers spécifiques en ignorant totalement la notion d'administration publique comme celle de fonctionnaires assurant un "service d'intérêt général". On ne parle plus de "fonctions sociales" mais de "fonctions économiques". Le social s'efface devant l'économique et le service public est subordonné à la société de marché !!!
Etonnant ?
Pas du tout !!!

4. Le 29/05/2017, 11h15 par Jean-Pierre LEROY

Je ne crois pas me tromper en soulignait le fait que l'Union Européenne ne cesse d'adresser des demandes pressantes visant à réduire le nombre de fonctionnaires et à redimensionner les missions de la puissance publique.
La charge d'Emmanuel Macron n'a donc rien d'original : elle s'inscrit dans le prolongement de ce qui est enclenché.
Dans cette ambiance générale le fonctionnaire est donc davantage perçu comme un coût que comme un producteur de valeur.
Mesdames, Messieurs, les Economistes, les élu(e)s de tout niveau, jusqu'au plus haut, faites vous donc à l'idée que la fonction publique est source de richesse.
Comme le rappelle l'économiste Philippe Ramaux (2012) dans "L'Etat social : pour sortir du chaos néolibéral " " La contribution au PIB des administration s'élève à 333 milliards d'euros soit 1/3 de ce que représentent les sociétés non financières. De plus, cette valeur produite a avant tout une valeur d'usage, c'est à dire une utilité (soigner, éduquer, protéger etc), elle n'est pas destinée à dégager des profits.

5. Le 29/05/2017, 11h22 par Pascal

De plus encore !!!
Il est utile de rappeler que l'Etat reste le premier employeur et que les fonctionnaires, en ayant un revenu assuré, contribuent à la consommation globale et permettent d'assurer une stabilité (de consommation et d'offre de services publics) dans les périodes de crise.
Si les fonctionnaires avaient été salariés du privé pendant la crise de 2008, nous aurons constaté de nombreuses pertes d'emplois jusque dans les secteurs stratégiques comme la police ou les hôpitaux.
Cependant, la réduction des déficits et la pression de Bruxelles conduira au total d'ici fin 2017 à une suppression de totale de 22 000 postes depuis 2008 dans le secteur de la santé...

6. Le 29/05/2017, 11h30 par Marceline

Le public ne stimule-t-il pas le privé ?
La statut de fonctionnaire est en fait précieux car il offre une mission de service public dépassant les seuls principes de rentabilité .
Plutôt que d'opposer les salariés du privé et les fonctionnaires, il serait plus avisé de rappeler qu'un bon secteur public stimule le développement du secteur privé en lui offrandes services et des infrastructures de qualité et que les deux secteurs sont complémentaires.
Le nouveau Président de la République m'en voudra peut-être de souligner que 2 mois après sa charge contre la fonction publique les attentats de novembre 2015 puis ceux de Nice le 14 juillet 2016 nous ont tragiquement rappelé l'utilité et l'efficacité de nos services publics et à quel point il est important de les préserver !!!!!!!!

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